PARAIN (Brice). - Lot 177

Lot 177
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PARAIN (Brice). - Lot 177
PARAIN (Brice). Né à Courcelles-sous-Jouarre. 1897-1970. Philosophe, essayiste. Grand ami d'Albert Camus. L.A.S. de ses initiales « BP » à « Cher Merleau-Ponty ». S.l., 15 mai 1945. 3 pp. 1/2 in-8. En-tête de la NRF. PASSIONNANTE LETTRE DE BRICE PARAIN AU PHILOSOPHE PHENOMENOLOGUE MAURICE MERLEAU-PONTY ...J'ai lu votre avant-propos hier soir et ce matin. Le mieux donc est que je vous écrive tout de suite. Il ma confirmé dans ce que je vous ai dit hier un peu brutalement. (Un peu brutalement car, je m'en rends compte de plus en plus, toute ma mission serait de sauver la France de la phénoménologie, et ma joie d'y parvenir, mais j'ai le temps contre moi, il faut que les événements se succèdent dans l'ordre, quand on n'en est même pas encore à Hegel on ne peut pas sauter dans le XXe siècle. Pour vous, vous en êtes au bord ; il ne faudra qu'un peu de marxisme. Cf p XI « Le monde est cela que nous percevons ». Non. Nous ne sommes pas cet être littéraire, ou plutôt nous ne le sommes pas seulement, et les littérateurs n'ont de sens que lorsqu'ils sont une très faible minorité, qu'ils sont tout de suite absorbés, qu'ils ont un corps social, de même que la révolution na de sens que lorsqu'elle aboutit à une vraie parole, c'est-à-dire à une décision. Le reste est bien de l'ordre des silences. La phénoménologie veut transformer le silence en parole. C'est cela l'impossible. Il y a en effet un problème de l'intuition. Bergson était à sa place dans l'histoire. Et peut-être faut-il longtemps parler de l'intuition, comme les Allemands l'ont fait au 19e s. et les Russes pour arriver à comprendre quelle n'est qu'un moyen de la parole et que la parole est un sacrifice, de même qu'il faut longtemps mariner dans l'esthétisme, probablement pour arriver à comprendre que le sentiment esthétique est bien en effet, à l'origine (ce que vous en dîtes p. XII et XIII est fort juste) mais au service de la logique...Enfin bref voici mes réflexions les unes après les autres. Votre avant-propos est excellent, clair, juste, fort. Il arrive au bord du salut. Mais, sil est vrai que « la philosophie est de r(é)apprendre à voir le monde », elle ne commence à être philosophie lorsqu'elle la vu de nouveau, lorsqu'on a jeté le brouillon et qu'on écrit le résultat. Voilà notre condition (...). Sinon (p. X) vous respirez le rêve de l'âge d'or (« avant toute thématisation »), vous restez dans la description, vous oubliez la dialectique, le dialogue, le rôle historique de l'homme, et votre rentrée dans l'histoire est uniquement esthétique, elle est héroïque, c'est une rentrée de victime, qui se sacrifie elle-même pour ne rien sacrifier, ce qui est contradictoire. Nous payons l'interprétation occidentale du christianisme, dans laquelle il n'y a plus de résurrection... Je vais trop vite. C'est qu'il faut que je prenne mon train tout à l'heure. Nous en reparlerons. Et peut-être que mon fragment sur le langage et l'existence, puis mon roman vous expliqueront mieux ce que je n'ai plus envie de redire maintenant. Ce qu'il faut que vous compreniez bien maintenant, c'est que le corps est une nécessité et non un remède (...) que de même la communion est une nécessité (extérieure, imposée) et non un remède, que le remède ne vaudra que lorsque le corps aura de nouveau ce qu'il faut pour être un corps pensant (...). Encore un effort et verrez clairement (vous le dîtes presque d'ailleurs p. XII) que tout se tient dans l'idéalisme allemand et la critique du jugement à Husserl, Heidegger et la littérature d'aujourd'hui, que notre joie occidentale n'est pas sortie de ce problème de l'axiomatisation de sa pensée, mais qu'un axiome na de sens que lorsqu'il est appliqué à une découverte, que sa vérité est précisément de ne pas être formulée, comme dans Archimède l'axiome de l'infini, alors qu'il se vide lorsqu'il est formulé, et que cette formulation signifie qu'il doit vider la place à un autre. Il faut que notre joie occidentale sorte dune façon ou dune autre de son aristotélisme actuel. On l'y forcera bien...
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